Laurent Piemontesi allenamento dei tavoli bianchi

LONGÉVITÉ

Préambule

L’Art du Déplacement est une discipline complète basée principalement sur des actions moteurs comme la course, le saut et le grimper dans le but de franchir des obstacles ou interagir avec eux. En plus, à l’intérieur de ces actions sont sollicitées des filières d’effort apparemment opposées mais qui se complètent en vérité. La technique du saut de bras, où sont requises des qualités d’explosivité, résistance, robustesse et légèreté serait une illustration significative de cette complémentarité. Et dans cette pluralité gravée dans l’ADN de l’Art du Déplacement, où le risque de spécialisation est moindre, je vois un des secrets, sans le doute le premier, expliquant la longévité que nous pouvons avoir dans le mouvement. Il en découle une richesse technique accessible à tous et où chacun peut trouver quelque chose pour soi.

Conséquence directe : l’Art du Déplacement, comme nous le pratiquons et transmettons est UNE DISCIPLINE INCLUSIVE.
Conséquence indirecte : enseignement passif mais effectif de LA TOLERANCE.

Je reviens sur comment, pendant des années, je me suis limité à définir l’Art du Déplacement : partir d’un point A et arriver jusqu’un point B, en grimpant, courant ou sautant et en utilisant le décor ambiant. Je n’ai pas exprimé plus de concepts que ça non par pour une incapacité à formuler mes idées ou par paresse, simplement je vivais la pratique et la faisais vivre aux autres. Surtout l’épaisseur et la consistance au-delà de l’apparence étaient pour moi d’une telle évidence. Elles l’étaient pour quiconque cherchait quelque chose d’inexprimé en soi et non atteignable en surface.
Dans le temps, j’ai dû mettre des sous-titres dans la transmission, la représentation et la diffusion de l’Art du Déplacement parce que oui, j’étais saoulé d’entendre des pratiquants à temps partiel et prétenduement penseurs raconter ou analyser ce que nous faisions en se basant sur des phrases magiques prises ci et là. Par exemple celà consiste en premier lieu à utiliser au mieux les ressources physiques, mentales et créatives dont nous disposons à diverses étapes de la vie. Les approfondir si le cœur nous en dit. Comme ça je vois et promeus l’Art du Déplacement. Simple, lisible et accessible. Une confrontation honnête avec soi-même, entouré des autres, visant à améliorer la perception des propres capacités, et donc leur pleine conscience.
Indubitablement, l’absence de compétition aide à préserver l’intégrité physique et mentale d’un pratiquant et avoir une vision à long terme. Dans l’Art du Déplacement un pratiquant s’appelle Yamak, en référence à l’histoire Yamakasi qui a jeté les bases de la philosophie prégnant l’Art du Déplacement, puis les courants ensuite générés. J’ai choisi d’aborder le thème de la longévité parce que mon expérience peut aider quelqu’un intentionné à bouger au-delà du potentiel jeunesse. En plus, autour de la durée je peux aborder d’autres sujets intimement liés.

Je choisis de commencer avec la blessure car c’est le premier contraste venant à l’esprit quand on pense à la longévité. Combien de trentenaires disent :
-J’aimerais bien faire pareil, mais j’ai les genoux en vrac.

Bref, si nous avons été assez malins et chanceux à ne pas multiplier les blessures de circonstance, nous serons confrontés à celles d’usure malgré tout. Et ouais ! Le temps qui passe met à rude épreuve nos organismes. Je ne crois pas qu’il soit possible d’échapper à la blessure et il n’existe pas de méthode pouvant en éviter l’apparition, pas même en appartenant au peuple des fleurs et des plumes. Le mieux qu’on puisse faire est d’en limiter la survenance, l’impact et la fréquence.
Avec l’expérience j’ai compris que chacun de nous devra trouver sa gymnastique de réveil ou de pré-entrainement. Celle de réveil peut consister en des mouvements simples et doux au matin avant de commencer une journée de travail par exemple, un peu comme mettre de l’huile sur des portes grinçantes. Concernant la gymnastique de pré-entrainement, durant presque tous mes workshop désormais, je laisse au moins six minutes aux participants pour entrer dans l’état mental du training. D’ordinaire, qui bouge depuis longtemps envoie une série de signaux bien spécifiques pour s’auto-signifier que le moment de l’entrainement est arrivé et en accepter l’imminente production d’efforts. Je l’ai appelé rituel et chacun a le sien, chacun a sa manière d’allumer les lumières pour mieux voir dans l’obscurité. Ce peut être un banal café ou quelques mots échangés avec un tiers. En agissant ainsi j’obtiens une meilleure attention et réactivité aux diverses équations techniques ou physiques proposées, donc l’hypothèse de blessure diminue.

En outre je préfère responsabiliser et valoriser les histoires de chacun.

J’ai évoqué la blessure de circonstance, celle résultant d’un saut, d’une technique ou d’un exercice. Pour en limiter l’apparition, et donc compromettre le moins possible les plans de la longévité, il convient se soumettre à une bonne préparation physique générale, non dictée uniquement par la réalisation de mouvements spécifiques ou par des standards esthétiques, mais par les besoins généraux du corps. Les actions répétées de sauts sont très exigentes pour l’organisme comme quand on passe de la poussée à l’atterrissage lors d’un saut, où l’action extension/compression même brève est assez violente. En plus, la plupart du temps et pour la grande majorité des personnes vivant en ville, l’environnement est principalement fait de béton et d’asphalte. N’importe qui ayant un peu de bon sens ne peut ignorer à quel point le béton est dur et agressif pour le corps. Ouais, même si on est le champion international de l’atterrissage en douceur. Inévitablement on doit penser à la préservation de l’intégrité physique et tenter de se construire une armure naturelle. Une mission ardue quand dans le même temps on a pour objectif de développer le “potentiel jeunesse”, là ou se trouve la fenêtre idéale pour spéculer sur la force maximale en devenir. Là où se trouvent plus de moyens pour conquérir le monde en octante secondes. A première vue on pourrait croire qu’il s’agisse de deux axes de travail opposés, mais encore une fois ils se complètent. (Protection/potentiel).

Quand on vieillit le principe est très différent. Après un training qui a consumé beaucoup d’énergie, physique et mentale, il est indispensable d’effectuer un training réparateur. Après une session de pliométrie ou un festival de bons sauts par exemple, faire une session sur les barres histoire de reconnecter toutes les parties désunies du corps. On a encore des moments de force et de grâce naturellement, des fulgurances, mais plus on s’éloigne de la jeunesse plus rarement ils se présentent. Et plus courts ils sont. Comme un train qui fait un voyage toujours plus long avant d’arriver en gare de super power. Et y attend moins. Mais nous avons une meilleure conscience de ce que nous faisons et comment. Ça ne signifie pas intellectualiser et compliquer chaque mouvement, exercice ou technique. Pas dans le moment de l’action tout du moins.
Puis parler de super conscience parce que tu bouges un doigt après l’autre… Arrêtes tes conneries.

Je crois dans la simplicité, comme pratiquant et comme coach. M’entrainant avec un minimum de sérieux je sais écouter mon corps et si d’aventure j’exagère, je le comprends. Je peux me fier de mon instinct car il existe une réelle connexion entre la tête et le corps, merci à une pratique constante. Je vis et respire ce que je fais même quand je ne m’entraine pas, je crois qu’il convient parler d’art de vivre. Petite parenthèse : avec cette manière de penser j’ai développé une capacité d’observation aigue me permettant d’analyser promptement une personne durant un training, pour ensuite la placer face à des défis adaptés, avec le juste degré de résistance.

Le dépassement de ces défis est directement impliqué dans l’acquisition et l’établissement de nos CERTITUDES. Une étape vitale parce qu’elle augmente la confiance que nous pouvons avoir en nous et alimente donc notre auto-estime. N’importe qui impliqué dans la transmission, et dans n’importe quelle spécialité, peut imaginer sans peine les bénéfices d’un telle pédagogie. Inutile de faire un dessin.

J’ai noté l’importance de pouvoir capitaliser sur nos progrès, et pour ce faire, il faut limiter les interruptions pendant les phases d’ASSIMILATION. Prendre le temps de confirmer et valider chaque pas pour ne pas devoir constamment retourner sur ses propres pas. Quand la technique ou le mouvement devient facile alors on reprend sa marche en avant. D’habitude, pour moi ou quand j’entraine les autres, je passe d’un niveau à l’autre quand la SERENITE gouverne à nouveau l’esprit après d’éventuelles interférences.

Pas mal de gens obsédés par l’immédiateté sollicitent la force athlétique sans avoir le corps prêt à supporter continuellement ces efforts. Ou ils ont disparu, ou ils ne reviennent pas comme ils étaient une fois. Parce qu’ils ont cramé le potentiel sans en avoir pris soin. Sans se protéger. Je fais un petit détour : dernièrement je vois bien comme c’est à la mode de s’entrainer avec les poids. Pourquoi pas ? J’ai essayé également sans perdre de vue le training de protection, surtout ça représentait un pourcentage infime de mes recherches puisque la beauté de l’Art du Déplacement réside dans l’utilisation et l’optimisation de ce qui existe déjà. Avec Yann, Chau et Williams nous étions en avance sur la compréhension de l’environnement en utilisant et recyclant les ressources présentes, et sans le savoir nous avons initié une petite révolution culturelle en ramenant l’activité physique dehors, évitons de la ramener au zoo. Okay, je me suis égaré…

Au moment de la blessure c’est très important de rester dans sa zone de confort si on ne veut pas s’arrêter de bouger pour toujours. Quand je suis dans un pareil cas je reste sous le seuil de la douleur. L’entrainement est réussi si je n’ai pas empiré la blessure, ainsi j’en limite l’impact. J’ai pris grandement en considération la blessure parce qu’en plus de ralentir la progression, elle laisse un ou plusieurs signes dans le corps, sur l’instant et dans le futur. On arrive à l’oubliée mais elle nous rappelle un jour ou l’autre, comme le créancier. Et oui ! Donc ça devient un point de faiblesse permanent et dormant, pas seulement pour la partie endommagée mais pour tout ce qui se trouve autour. Prenons une entorse à la cheville, pas juste l’articulation est compromise mais toute la jambe jusqu’au dos. En sus ça peut miner nos convictions, donc nos certitudes. Pour moi et j’imagine pour tous ceux qui ont une vision à long terme dans le mouvement, le corps est un puzzle : il manque une pièce et il n’y a plus d’équilibre.

Quand je m’entraine ou entraine les autres je ne cherche pas l’esthétique mais L’HARMONIE, pour des raisons que j’explique dans ma philosophie de transmission. La différence est abyssale.
Aussi varié que puisse être l’Art du Déplacement, nous avons des affinités dans les mouvements, instinctives ou conditionnées par notre identité moteur naturelle. Une préparation physique générale permettra d’harmoniser le vide technique et physique résultant de nos préférences. J’ai eu la chance de n’avoir reçu aucune aide de la génétique donc j’ai dû pas mal m’employer. Un mal pour un bien, j’y ai appris la détermination, la valeur du travail et de l’engagement. Mon autre chance a été de comprendre rapidement que notre pratique est très éprouvante physiquement et que les sauts consument mais ne préparent pas le corps, surtout les articulations, comme tous sports constitués de courses, sauts et changements brusques d’appuis ou direction. Impossible d’ignorer le faux débat entre quantité et qualité, comme si on devait faire un choix radical et définitif entre ces deux filières d’exercices. N’importe quoi. Quiconque passe réellement du temps sur les terrains sait qu’elles sont d’égale importance. Sur la durée par exemple on y cultive la volonté et un esprit résolu, finir ce qu’on a commencé n’est pas comme ça répandu, pas comme on le croirait. Encore moins ne pas abandonner quand les vents contrarient.

Dans la préparation physique je distingue les exercices spécifiques de ceux généraux. Le problème est que les premiers sont très souvent dictés par les réseaux sociaux ou YouTube, d’une impulsion ou d’une mode, pas d’une recherche personnelle ou la conscience de carences. Les seconds visent à la protection du corps et à la construction de l’armure naturelle, pas vraiment sexy. Dans cette optique j’ai créé mon training des 101, originellement appelé Body Armor mais très vite rebaptisé “quadrupédie de la mort” dés lors que je l’ai partagé. Ma routine ne devait dépendre d’aucune sorte de matériel, faisable partout et en mouvement. Dernièrement Body Armor est devenu mon “rendez-vous avec le physiothérapiste”, le but étant de recompacter toutes les parties du corps en fin de semaine.
Je sais que ça arrive un peu comme un cheveu sur la soupe mais petite précision, l’exercice est avant tout une INFORMATION pour moi. J’informe le corps et la tête des possibilités de mouvements.

Face à de nouveaux défis on a tendance à déclarer assez facilement :
-Je ne suis pas capable, je n’ai pas les muscles !
-Je ne peux pas, je vais me niquer !

Privés d’informations le corps et la tête ont une marge de manœuvre réduite, générant un état dénué de conscience objective. Après avoir créé des stimulis et un peu de pratique on pourra parler de capacité ou incapacité. Un raisonnement que j’applique dans ma pratique journalière, pas seulement quand je coache les autres, en faisant un travail constant sur la redécouverte et la diversification des fonctions du corps. Dans mon approche personnelle, pratiquant ou coach, j’ai une certaine tolérance pour l’erreur, à l’atterrissage d’un saut nous ne devons pas aller vers l’avant avec les genoux et perdre la tension musculaire qui les protège, oui c’est le classique des classiques chez les débutants… En fait si ça se produit ce n’est pas un drame, une faiblesse peut devenir une force, dans le cas présent j’informe les jambes que c’est possible de rater, ainsi elles apprennent à se défendre et réagir.

L’EXCEPTION NE DOIT PAS DEVENIR LA REGLE, VOILÀ TOUT.

Durant une session de squats sautés on se retrouve à nouveau dans le concept de la prise d’information : les jambes développent des réflexes de défense et de protection à l’impact. Des cuisses de mammouth qui répondent mal aux chocs, ou en retard, ne servent qu’à remplir des pantalons trop larges. (Pour moi il y a deux types de réflexes de défense : celui protecteur et celui inhibiteur, on en reparlera un jour). Je dois faire un petit détour, un autre, et rappeler que j’ai été entrainé par Yann puis inspiré par Chau et Williams. Personne d’entre nous ne suivait une mode, une humeur, on se préparait pour la vie à venir.

Selon moi un coach devrait être capable d’identifier les zones de confort, travail et stress de chaque personne qu’il entraine, quelle que soit la discipline. Quand on s’entraine seul c’est la même histoire. On doit trouver le juste degré d’engagement et de résistance afin de rester présent dans le moment et l’action. Dans le cas contraire on risque d’affaiblir la motivation et l’intérêt d’agir donnant lieu à une vilaine restitution, ce qui pourrait mené à moyen terme à une lassitude, sinon répugnance envers le mouvement. Entrer dans sa zone de travail c’est rencontrer une résistance, une certaine difficulté nécessitant une forte mobilisation, mais non maximale, du corps et de l’esprit. On développe ainsi une culture du combat et de l’affrontement envers soi-même et l’adversité, donc une ténacité notable avec de possibles applications dans la vie quotidienne.

Quiconque a pas mal d’expérience doit jouer avec ses certitudes et faire entrer raisonnablement le doute. Perso, je m’efforce de rompre la monotonie des training en les faisant évoluer ou en important régulièrement des défis acceptables. Mon but étant de briser le caractère hypnotique des répétitions et rappeler l’attention de l’esprit en permanence. En plus, par l’apprentissage de nouveaux mouvements ou techniques on maintient un haut niveau de motivation. J’ai dit considéré l’exercice avant tout comme une information, plus on en délivrera au corps et à l’esprit et plus nous aurons des instruments pour nous exprimer. Et plus on développera une faculté d’adaptation et augmenterons la capacité à répondre à de nouvelles demandes. Peut-être un nouveau sport pour qui ne veut cesser d’explorer. Un débutant doit capitaliser sur ses certitudes avant de les interroger, ce qui lui permettra d’augmenter sa confiance en soi et atteindre dans le temps un état de conscience objective. Cet état deviendra une force intérieure, indépendante de contextes parasitant les actions à accomplir.

Durant la transmission, j’ai identifié la période de familiarisation, où je laisse le temps pour expérimenter et explorer, ça rend plus fluide le processus de découverte puis de compréhension des propres capacités et renforce le sentiment de la victoire personnelle. Il ne s’agit pas de faire croire mais bel et bien de laisser conquérir. Accompagner. Si on est trop scolaires et invasifs on mettra le pratiquant en position d’exécuter seulement et nous nuirons à l’acquisition des certitudes. C’est un travail de fond, long et laborieux, mais c’est le cout de l’éducation, un peu cher mais dans le même temps ça n’a pas de prix pour celui qui en bénéficie. Lorsque j’apprends des nouvelles techniques ou reprends des vieux mouvements oubliés, je reste calé dans l’étape de familiarisation, aucune obligation immédiate. Par obligation je n’entends pas forcément un résultat mais un engagement mental. Cette manière de penser m’a porté assez naturellement au concept de PERFORMANCE INDIVIDUELLE, et ça sous-tend de prendre en considération le point de départ quand on regarde le point d’arrivée, ainsi et seulement ainsi je peux donner une valeur au chemin parcouru. Le tout sans perdre de vue l’élément FRUSTRATION ! Et oui ! La frustration est une étape inévitable dès lors qu’on apprend quelque chose de nouveau, il faut s’en souvenir pour ne pas s’autodétruire, ou laisser les autres se détruire, avec notre extrême sévérité et nos attentes précipitées. Je n’oublie pas qu’il y a plus grave dans la vie que de ne pas faire un saut même si sur le moment ça semble être la seule chose qui compte. Bien évidemment on ne pas renvoyer sans cesse le devoir d’action sinon nous n’acquièrerons pas nos certitudes.

SUR LES ERREURS ET DEFAITES ON APPREND, SUR LES VICTOIRES ET CONQUETES ON CONSTRUIT.

Petit retour sur la motivation, c’est plus stable et durable d’avoir des objectifs qui naissent de profondes aspirations personnelles. On peut être inspiré par d’autres personnes oeuf corse, mais elles ne doivent pas être notre moteur. Élémentaire n’est-il pas ?

Je parle et promeus souvent la notion de groupe, Yamakasi est un groupe, le slogan de l’Art du Déplacement est : ON COMMENCE ENSEMBLE ET ON FINIT ENSEMBLE… Mais ça ne veut pas dire de renier l’individualité, au contraire car ça génère un cercle vertueux : plus l’individu est fort et plus le groupe le devient et nourrit à nouveau les individus. Même si c’est évident pour moi et je l’espère pour beaucoup d’autres, je dois préciser que cette alchimie nous met naturellement l’un ou l’une au service de l’autre. Ceci étant dit je suis persuadé que dans la longévité un des secrètes soit de savoir s’entrainer tout seul, sans devoir attendre le pote qui un jour ou l’autre a autre chose à faire. Et il n’y a aucune raison de s’en désoler, ainsi va la vie pour mille raisons.

Sans l’espace créatif indissociable de l’Art du Déplacement la performance individuelle aurait moins de raison d’être évidemment. Encourager l’exploration et la découverte favorise la prise d’initiative et la recherche de solutions. Plus que l’adaptation qui a plus à voir avec une réaction, c’est bel et bien l’esprit créatif qu’on cultive. Spontanément et simplement, de manière concrète. Un ajournement perpétuel des connexions neuromusculaires et des fonctions cognitives sont quelques-uns des bénéfices à mettre au crédit d’une telle démarche. Pour ces raisons entre autres je considère la philosophie de l’Art du Déplacement comme celle du corps pensant, en opposition bien sûr au corps exécutant : le corps récite sans chercher de solutions éventuelles. D’ordinaire ce sont des postures de sports de masse qui visent à la compétition et ont comme référence la performance universelle. Ces systèmes anéantissent l’identité de l’individu lui niant le droit à la diversité. Il en résulte une approche assez élitiste, peu inclusive où peu peuvent se reconnaitre sur le long terme. Et oui, la fenêtre de la super force n’est pas éternelle. Je pense que le gymnastique telle que nous la connaissons est l’antithèse de l’Art du Déplacement. Comme l’est l’exclusive et frénétique recherche de la discutable utilité. La présence de la partie créative inhérente à notre pratique autorise l’individu à maintenir un haut niveau de motivation, donc d’engagement. Il en émane naturellement une reconnaissance de la performance individuelle sans renier celle universelle.

Le travail constant, véritable et concret de l’Art du Déplacement entre le visible et l’invisible, entre corps et esprit, porte à une réelle harmonie. C’est plutôt fatiguant et demande une attention constante mais dans le même temps est une source inépuisable de stimules. Chaque jour offre la possibilité d’un défi et sur plusieurs niveaux, mental, physique et technique. Et chaque niveau est riche de nuances et variations.

Une vie ne suffit pas à les dompter.

Il n’y a pas de temps à perdre.